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Culture

Marionnette : exposition et spectacles

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Une exposition et quatre spectacles. Il n’en fallait pas moins à François Lazaro, figure du monde de la marionnette, pour tirer sa révérence. Du 4 au 20 décembre, il investit la Nef pour un dernier tour de piste avant de transmettre le patrimoine de sa compagnie, le Clastic théâtre, à des musées nationaux.
Article de Alain Dalouche, publié dans l'agenda de Canal n°284, décembre 2019.

Canal : Après 50 ans de présence dans les arts de la marionnette pourquoi cessez-vous soudainement toute activité ?
François Lazaro : Il y a quelques années, j’ai vu, sur scène, la danseuse Carolyn Carlson très âgée qui ne parvenait pas à se relever. Je m’étais dit que je ne terminerai pas de la sorte. Je pourrais continuer à mettre en scène sans jouer, mais je trouve qu’il y a énormément de jeunes talents qu’il faut laisser grandir. Il faut savoir poser ses bagages et se mettre dans l’ombre.

Pourquoi appeler votre exposition Ruines ?
F.L. : J’ai toujours essayé d’utiliser des mots qui posent question. Une fois que le théâtre se termine, cela devient une ruine. Mais une ruine se visite, comme l’exposition de la Nef qui prend la forme de ce qui va se retrouver ensuite dans les musées nationaux. L’idée est de transformer en musées de théâtre de marionnettes, les musées qui, jusqu’à présent, présentaient des marionnettes alignées les unes à côté des autres, sans référence au texte, à la narration, la scénographie. La marionnette est un instrument théâtral et pas un objet en soi. Ce que je mets en place à la Nef, ce sont les atmosphères développées dans les spectacles du Clastic théâtre, ma compagnie, depuis le début des années 1980. Ces ambiances passent par le son, les éclairages, les textes…

Sur les quatre spectacles programmés, vous jouez un texte contemporain, L’Ogre et la Poupée. Pourquoi ce choix ?
F.L. : Je termine par cette lecture «  gestualisée  » d’un texte qui m’avait été confié par Daniel Lemahieu, un grand auteur de théâtre. Il s’agit d’une sorte de portrait d’un «  marionnetteur  ». Seul à une table, j’interprète quatre personnages avec une petite poupée devant moi, dans un conte pour adultes où il est question de manipulation, de dévoration et de poupées. Les autres pièces sont issues de compagnonnages actifs. Le Théâtre aux mains nues (où se déroule la première partie de son clap de fin, N.D.L.R.), la Nef et le Clastic théâtre sont en effet identifiés par le ministère de la Culture comme faisant partie des lieux français pour la marionnette qui pratiquent le compagnonnage afin de transmettre ce savoir aux nouvelles générations.  

Avant de la quitter, comment jugez-vous la scène actuelle du théâtre de marionnette ?
F.L. : J’ai envie de biaiser la question et de demander : «  Où en est le théâtre ?  » En posant la question de cette façon, on se rend compte que la marionnette est à sa très juste place aujourd’hui : au cœur du théâtre. D’une certaine manière, en mettant le personnage dans un autre corps que celui du comédien, la marionnette confirme que le théâtre est un artifice. On s’aperçoit ainsi de la force du théâtre de marionnettes qui a cette capacité de prendre en charge un texte contemporain qui n’est plus forcément dans la narration. Il y a beaucoup de textes-matière au théâtre et la marionnette s’y sent extrêmement à l’aise.

Pourquoi transmettez-vous le patrimoine du Clastic Théâtre aux musées nationaux ?
F.L. : L’histoire de la marionnette reste à écrire. Il existe peu de références et une pauvreté d’images. Étant donné que depuis les débuts de ma compagnie, j’ai soigneusement rangé les dossiers et beaucoup contribué à la formation, je suis en capacité d’apporter un morceau de cette histoire. Et le ministère de la Culture a accepté que ma dernière convention triennale porte sur la transmission.

Tout savoir sur l'exposition et les quatre spectacles

Ruines
«  L’exposition retrace des îlots de présences et d’atmosphères développées dans les spectacles du Clastic Théâtre qui ont fait date dans l’histoire de l’art de la marionnette depuis le début des années 80. On y retrouve trois de mes compagnons de route : le dramaturge Daniel Lemahieu, l’inventeur d’objets Francis Marshall et le musicien Jacques Di Donato.  »
Entrée libre
Du 4 au 20 décembre, du lundi au vendredi de 14.00 à 17.00 ; les samedis de 10.00 à 13.00.

Délire à deux, d’Eugène Ionesco
«  Il s’agit d’un compagnonnage de plus de 20 ans avec Nicolas Goussef, l’interprète, à la fois héritier du mime et de la marionnette. Seul sur scène avec deux chaises, ce qu’il fait avec ce texte de Ionesco est une sorte de petite leçon de théâtre.  »
Vendredi 6 décembre à 19.00 ; samedi 7 décembre à 15.00 et 19.00.
Durée 1.10. Tarifs : 3 €, 7 €, 10 €.

L’Ambigu(e), d’après Roland Topor
«  La jeune metteure en scène Elzbieta Jeznach reprend la galéjade que Topor a écrite sur le mythe de Dom Juan. Vieillissant, Dom Juan se regarde dans un miroir et se découvre femme, la femme qu’il a toujours poursuivie. C’est assez drôle !  »
Vendredi 13 décembre à 19.00 ; samedi 14 décembre à 15.00 et 19.00.
Durée 1.10. Tarifs : 3 €, 7 €, 10 €.

Le viol de Lucrèce, de Shakespeare
«  La metteure en scène Morgane Reignier est engagée sur la voie du féminisme et reprend Le viol de Lucrèce de Shakespeare. Ce texte est mis en regard avec des paroles entendues à la télévision ou à la radio sur le viol. L’ensemble essaye de suggérer une autre voie, celle de la résilience.  »
Mercredi 18 décembre à 15.00 et 19.00 ; jeudi 19 décembre à 19.00.
Durée : 45 min.  Tarifs : 3 €, 7 €, 10 €.

L’Ogre et la poupée, de Daniel Lemahieu
 «  Daniel Lemahieu m’a écrit ce texte à quatre voix pour une seule personne. Lorsque je l’ai monté à l’époque, avec deux musiciens, une comédienne, un régisseur, chacun portait un des rôles. J’ai repris ce texte seul, assis devant une table avec une poupée. Toutes ces voix sont un moi fictionnel.  »
Vendredi 20 décembre à 19.00.
Durée : 1.30.  Tarifs : 3 €, 7 €, 10 €.